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Loco / Kleinvonessen

Recette "caliente" du chili végétarien de Soledad la cubaine dans Karacoli

Dernière mise à jour : 11 déc. 2022


Aussi vrai qu’un cigare cubain doit crisser de façon imperceptible à l’oreille, aussi sûr que la mousse d’une bière haïtienne Prestige doit crépiter sur les lèvres quand on y passe la langue avant de la faire claquer, un bon chili (et qui plus est, celui de Soledad) se doit de chauffer le cœur et la tête. Normalement, au moment précis où tu porteras la première cuillerée à ta bouche et que tu t’apprêteras à féliciter la cuisinière par un « Délichiouche » déformé par le chaud du plat, tu devras ressentir une douce chaleur monter le long de tes joues à venir les rosir, s’intensifier sur tes tempes et exploser en perles de sueur sur ton front.

C’est cela, le seul et le vrai secret du chili. Le reste n’est que littérature et fadaises de pseudo-spécialistes pour alimenter la controverse. Savoir si le chili a été inventé par les Mexicains, les Aztèques ou les cow-boys texans, savoir s’il faut de la viande, pas de viande, des haricots, pas de haricots, ceci cela, pas ceci cela, on s’en contrefiche éperdument. Cette bonne terre des Amériques n’appartient à personne, et le chili qui y pousse appartient à celui qui le trouve, libre à lui de l’accommoder à sa guise. Depuis que le monde est monde, le chili a toujours existé, mon pote, et l’homme l’a toujours utilisé, que ce soit au temps des cavernes pour faire passer une viande d’auroch ou de bison un peu faisandée, ou plus tard par les cow-boys pour donner de la saveur à des ragoûts de buffles ou de serpents à sonnettes un peu rances, ou encore par les Indiens Taïnos pour relever la viande des conquistadores espagnols, réputée fadasse et insipide. Alors savoir qui sera aujourd’hui champion du monde du meilleur chili, c’est juste une hérésie. Le chili, ce n’est pas de la cuisine, c’est juste une communion, un instant de grâce, un partage magique, un moment unique. Peu importent les ingrédients, c’est ce que tu mets dans l’instant qui compte, c’est comme une bonne jam session de jazz latino, une descarga enlevée et endiablée qui te portera et t’emportera quoi que tu fasses. Improvisation totale de rigueur, sois juste à la hauteur.

La partition peut alors commencer. Soledad ouvre deux Prestige, glisse une vieille cassette de Keith Jarrett, The Köln Concert, dans le vieux lecteur hors d’âge, te regarde de ses grands yeux verts en souriant et en choquant sa bière contre la tienne :

Se fue, amigo ![1]

Keith au piano, Soledad et toi au couteau : la magie opère et ne s’arrêtera qu’une 1 h et 7 minutes plus tard très exactement. Fais gaffe quand même : à trop mater l’échancrure de son corsage, tu peux te couper un doigt.

Si tout se passe normalement, Keith sera en train d’attaquer le rappel quand Soledad t’entourera par-derrière avec ses bras et te susurrera :

Mezcla bien si no esto va pegado en el fondo de la marmita ![2]

Coincé contre la gazinière, tu sentiras sa poitrine chaude et dure s’appuyer sur ton dos, sa sueur ambrée et sauvage t’envahir et son bassin onduler contre tes fesses au rythme de la cuillère en bois :

Despacio, suave, muy dulce, con ternura como con una mujer ![3] À ce moment précis tu deviendras fou, mais Keith refermera le couvercle de son piano, Soledad relâchera son étreinte, et toi, ta cuillère :

Perfecto como esto, impecable, pone la mesa por favor ![4]

Les amis arriveront et le chili sera juste merveilleux, le pain-gâteau au maïs jaune et doré, succulent, et la Prestige, à peine glacée. Vous parlerez de révolution, de vaudou, d’amour et de voyages, Soledad mettra un vieux vinyle de Compay Segundo et vous danserez quelques bonnes rumbas. Tu feras le malin en envoyant des grosses volutes de fumée avec un Cohiba surdimensionné. Plus tard, tu raccompagneras les invités, et en voulant prendre congé de Soledad, celle-ci te murmurera :

Tranquilo, queda un poco, toma una copa de Barbancourt, voy a ducharme ![5]

Là, coco, c’est bon signe, mais ce n’est pas gagné pour autant, c’est elle qui décidera. Bonne chance.


Voici la recette, pour 6 personnes :


Mesures

1 tasse = ¼ litre = 125 g de farine environ


Ingrédients

- 2 tasses et demie d’haricots rouges (non cuits)

- 1 tasse de pilpil

- 1 tasse de jus de tomate

- 1 boîte de maïs

- 4 gousses d’ail

- 1 tasse et demie d’oignons hachés

- 1 tasse de céleri en branches coupé en petits dés

- 1 tasse de carottes coupées en petits dés

- 1 tasse de poivrons coupés en lamelles

- 2 tasses de tomates coupées

- 1 pincée de poivre de Cayenne + un peu d’huile d’olive pour faire revenir les légumes

- Le jus d’½ citron

- 1 cuiller à café de cumin en poudre

- 1 cuiller à café de basilic

- 2 cuillers à café de chili (voire plus selon les goûts)

- 3 cuillers à soupe de concentré de tomates

- 3 cuillers à soupe de vin rouge

- Sel et poivre

- Quelques gouttes de sueur de Soledad (sinon le chili ne sera pas habité)

- Une bonne quantité de bière Prestige bien frappée (la bouteille doit perler même s’il fait chaud)

- Quelques bons cigares cubains

- L’album de Keith Jarrett The Köln Concert (vous aurez compris pourquoi)


Recette

1. Mettre les haricots rouges dans une casserole et les faire tremper dans 6 tasses d’eau pendant 3 à 4 heures. Rajouter de l’eau et du sel et les faire cuire pendant 2 heures (ajouter de l’eau pendant la cuisson si nécessaire) jusqu’à ce qu’ils fondent sous la langue. Il est possible de les mettre à tremper la nuit.

2. Faire chauffer le jus de tomate et ajouter le pilpil. Laisser le tout gonfler hors du feu pendant 15 minutes.

3. Faire revenir les oignons et l’ail dans l’huile d’olive. Ajouter les carottes, le céleri et les épices, puis le poivron. Faire cuire jusqu’à ce qu’ils soient tendres.

4. Mélanger le tout, légumes, haricots, tomates, pilpil et chauffer très doucement. Si trop épais, ajouter le jus de tomates + épices.

La combinaison entre fèves et céréales (pilpil) fait que cette recette donne une protéine complète ! Servir le chili avec un pain-gâteau au maïs dont la recette est très simple :


Ingrédients

- Un paquet de levure

- 1 tasse de farine de maïs

- 1 tasse de farine normale

- Sel et 1 œuf

- 1 tasse ¼ de lait

- 3 cuillers à soupe d’huile de maïs ou autre


Recette

Mélanger la farine, le sel et la levure d’un côté, et l’œuf, le lait et l’huile de l’autre. Mélanger le tout aussi vite que possible. Mettre la préparation dans un moule à cake beurré. Cuire à 425° Fahrenheit (soit 210° Celsius) pendant 20 mn.


Dernier conseil : quand Soledad reviendra de la douche, si elle met Besame mucho de Cesaria Evora, prépare-toi à passer à la casserole !


Bon appétit ! Buen provecho !


FIN

[1]« C’est parti, mon ami ! » [2]« Mélange bien, sinon ça va coller au fond ! » [3] « Doucement, avec tendresse, comme avec une femme ! » [4] « Parfait, comme cela c’est nickel, tu peux mettre la table stp ! » [5] « Cool, reste un peu, prends un verre de rhum, je vais me doucher ! »


(Photo de Soledad la cubaine - Plage de Ti Mouillage Haïti)





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